Tous deux portent le
même nom et prénom : Sanou André. Ils ont le même jour et mois de naissance mais pas la même année et sont
tous deux peintres. En plus, il est quasi impossible de faire la différence
entre leurs tableaux tant ceux-ci se ressemblent. Une énigme dans le monde des
arts plastiques du Burkina.
Un André Sanou peintre peut bien en cacher un autre. A Bobo,
ils sont deux. Et cela n’est pas sans embarrasser les amateurs d’arts
plastiques. On se croirait dans une nouvelle de Yasushi Inoue qui porte sur un peintre célèbre dont le narrateur découvre
le double dans l’ombre : deux peintres, une même signature !
Ici nous somme dans le réel.
Tableau d'André Sanou (l'aîné) |
Il y a Sanou André, l’aîné, bien
connu dans le paysage artistique burkinabè depuis les années 90.
Peintre
autodidacte au grand talent, il compose
des tableaux abstraits d’une grande puissance.
Travaillant essentiellement avec des pigments naturels tirés des plantes
de son terroir et de la terre
latéritique de Bobo Dioulasso, la ville de sa naissance, il peint des grandes toiles
qui puisent dans le patrimoine africain
et principalement l’écriture des masques bobo.Ses toiles utilisent
une palette de rouge, de noir et de gris et sont tellement fignolés et truffés
de symboles géométriques pris sur les masques qu’ils donnent l’impression de
bouger. Une illusion optique qui les rapproche de l’art cinétique. Il a connu
la consécration en obtenant le GPNAL en 1999. Ensuite il fera un séjour en France avant de revenir à Bobo.
L’autre André Sanou, le jeune, a travaillé avec l’aîné. Il en
était une sorte d’apprenti pendant quelques années. Ils ont même peint ensemble.
L’aîné donnait les orientations, couchait les grandes lignes sur la toile et
laissait le soin au jeune artiste d’achever le travail. Ce qui se fait dans
tous les ateliers de peintres.
Tableau d'André Sanou Junior |
Après le départ
d’André Sanou en France, le jeune a continué à peintre et à signer Sanou André.
Son travail révèle un artiste très doué
dans le dessin et qui conçoit des toiles très fignolées. Il sera plusieurs fois
lauréat à la Semaine nationale de la culture (SNC). Plus tard, il signera André Sanou Junior pour se démarquer de son
aîné mais la confusion demeure. Ses tableaux et ceux de son homonymes se
ressemblent comme des jumeaux monozygotes et donc difficilement identifiables.
D’autant plus difficile qu’ils utilisent les mêmes pigments, puisent dans le
même patrimoine et peignent parfois des
sujets identiques. Chacun d’eux a par exemple une toile figurative représentant
un trompettiste de jazz !
Beaucoup de connaisseurs du travail d’André Sanou se sont
trompés pendant la dernière SNC car ils ont cru que la toile lauréate en peinture était de lui. C’est
pourtant André Junior qui l’a signée. Toutefois à y regarder de plus près, on
sent que le jeune peintre a des toiles plus surchargées et moins ajourés
dénotant d’un déséquilibre dans les contrastes. Ce qui ne se retrouve pas dans
les tableaux de l’aîné.
Il serait facile de déclarer que le jeune André n’a pas su se
défaire de l’influence de son maître et aîné mais les choses sont peut être
plus complexes. Il serait plus
intéressant de considérer que les deux André inaugurent un mouvement artistique au Houet, une sorte de
Factory, dont la tête de proue serait l’aîné. Et souhaiter qu’au fil des années
les deux André réussissent à démêler leur démarche tout en restant dans cette
peinture qui s’enracine dans le terroir tout en s’ouvrant au monde. Au regard
du potentiel d’André Sanou Junior, il est sûr qu’il peut trouver sa voie sans tremper son pinceau dans
la palette de son aîné.
Comme l’histoire bégaie et se répète dans le monde des arts
plastiques au Houet. Il y a eu aussi des amalgames dans les années 90 entre feu
Sanou André le sculpteur et André Sanou, le peintre. Mais cela restait au
niveau des noms mais pas du travail. Si l’on croit à la loi des séries, il est
plus que probable qu’un autre André Sanou surgisse dans quelques années pour
installer une autre confusion entre lui et André Junior. Serait-on condamné à
avoir chaque fois un Sanou André et son Double dans les arts plastiques au
Faso. ? Tout est possible avec ces…Bobos-là.
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